SPLEEN ET IDÉAL. LXXIV. LE MORT JOYEUX

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Dans une terre grasse et pleine d’escargots
Je veux creuser moi-même une fosse profonde,
Où je puisse à loisir étaler mes vieux os
Et dormir dans l’oubli comme un requin dans l’onde.

Je hais les testaments et je hais les tombeaux;
Plutôt que d’implorer une larme du monde,
Vivant, j’aimerais mieux inviter les corbeaux
A saigner tous les bouts de ma carcasse immonde.

0 vers! noirs compagnons sans oreille et sans yeux ,
Voyez venir à vous un mort libre et joyeux!
Philosophes viveurs, fils de la pourriture,

A travers ma ruine allez donc sans remords,
Et dites-moi s’il est encor quelque torture
Pour ce vieux corps sans âme et mort parmi les morts!

Source : Michel Lévy Frères, 1868. Les fleurs du mal.

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