Nous vivons dans un siècle où les farceurs ont des allures de croque-morts et se nomment : politiciens. On ne fait plus chez nous la vraie farce, la bonne farce, la farce joyeuse, saine et simple de nos pères. Et, pourtant, quoi de plus amusant et de plus drôle que la farce ? Quoi de plus amusant que de mystifier des âmes crédules, que de bafouer des niais, de duper les plus malins, de faire tomber les plus retors en des pièges inoffensifs et comiques ? Quoi de plus délicieux que de se moquer des gens avec talent, de les forcer à rire eux-mêmes de leur naïveté, ou bien, quand ils se fâchent, de se venger avec une nouvelle farce ? Lire la suite
Archives pour la catégorie XIXe siècle
PREMIÈRE NEIGE
La longue promenade de la Croisette s’arrondit au bord de l’eau bleue. Là-bas, à droite, l’Esterel s’avance au loin dans la mer. Il barre la vue, fermant l’horizon par le joli décor méridional de ses sommets pointus, nombreux et bizarres.
A gauche, les îles Sainte-Marguerite et Saint-Honorat, couchées dans l’eau, montrent leur dos couvert de sapins.
Et tout le long du large golfe, tout le long des grandes montagnes assises autour de Cannes, le peuple blanc des villas semble endormi dans le soleil. On les voit au loin, les maisons claires, semées du haut en bas des monts, tachant de points de neige la verdure sombre. Lire la suite
L’ATTENTE
On causait, entre hommes, après dîner dans le fumoir. On parlait de successions inattendues, d’héritages bizarres. Alors maître Le Brument, qu’on appelait tantôt l’illustre maître, tantôt l’illustre avocat, vint s’adosser à la cheminée.
« J’ai, dit-il, à rechercher en ce moment un héritier disparu dans des circonstances particulièrement terribles. C’est là un de ces drames simples et féroces de la vie commune ; une histoire qui peut arriver tous les jours, et qui est cependant une des plus épouvantables que je connaisse. La voici : Lire la suite
LE VENGEUR
Quand M. Antoine Leuillet épousa Mme veuve Mathilde Souris, il était amoureux d’elle depuis bientôt dix ans.
M. Souris avait été son ami, son vieux camarade de collège.
Leuillet l’aimait beaucoup, mais le trouvait un peu godiche. Il disait souvent : « Ce pauvre Souris n’a pas inventé la poudre. » Quand Souris épousa Mlle Mathilde Duval, Leuillet fut surpris et un peu vexé, car il avait pour elle un léger béguin. C’était la fille d’une voisine, ancienne mercière retirée avec une toute petite fortune. Elle était jolie, fine, intelligente. Elle prit Souris pour son argent. Lire la suite