LES OREILLES DU LIÈVRE

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Un animal cornu blessa de quelques coups
Le Lion, qui plein de courroux,
Pour ne plus tomber en la peine,
Bannit des lieux de son domaine
Toute bête portant des cornes à son front.

Chèvres, Béliers, Taureaux aussitôt délogèrent,
Daims, et Cerfs de climat changèrent ;
Chacun à s’en aller fut prompt.
Un Lièvre apercevant l’ombre de ses oreilles,
Craignit que quelque Inquisiteur
N’allât interpréter à cornes leur longueur :
Ne les soutînt en tout à des cornes pareilles.
Adieu voisin Grillon, dit-il, je pars d’ici ;
Mes oreilles enfin seraient cornes aussi ;
Et quand je les aurais plus courtes qu’une Autruche,
Je craindrais même encor. Le Grillon repartit :
Cornes cela ? vous me prenez pour cruche ;
Ce sont oreilles que Dieu fit.

On les fera passer pour cornes,
Dit l’animal craintif, et cornes de Licornes.
J’aurai beau protester ; mon dire et mes raisons
Iront aux petites Maisons.

Source : Édition Barbin et Thierry (1668-1694) – Livre V. Texte modernisé.

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