LE CERF MALADE

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En pays pleins de Cerfs un Cerf tomba malade.
Incontinent maint Camarade
Accourt à son grabat le voir, le secourir,
Le consoler du moins ; Multitude importune.
Eh ! Messieurs, laissez-moi mourir.
Permettez qu’en forme commune
La parque m’expédie, et finissez vos pleurs.
Point du tout : les Consolateurs
De ce triste devoir tout au long s’acquittèrent :
Quand il plut à Dieu s’en allèrent.
Ce ne fut pas sans boire un coup,
C’est-à-dire sans prendre un droit de pâturage.
Tout se mit à brouter les bois du voisinage.
La pitance du Cerf en déchut de beaucoup.
Il ne trouva plus rien à frire.
D’un mal il tomba dans un pire,
Et se vit réduit à la fin
À jeûner et mourir de faim.
Il en coûte à qui vous réclame,
Médecins du corps et de l’âme.
Ô temps, ô mœurs ! J’ai beau crier,
Tout le monde se fait payer.

Source : Édition Barbin et Thierry (1668-1694) – Livre XII. Texte modernisé.

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